Pour faciliter le travail des étudiants, j’ai sélectionné ci-dessous les seules Lettres de la Présidente de Tourvel. Je complèterai progressivement jusqu’à la fin de l’étude du roman.
PREMIÈRE PARTIE
Lettre VIII : de Tourvel à Madame de Volanges, mère de Cécile. Dans laquelle elle se dit ravie du prochain mariage de Cécile : « C’est bien de toute mon âme que je lui souhaite une félicité dont je ne doute pas qu’elle ne soit digne (…). Je me borne (…) à souhaiter à ce mariage un succès aussi heureux qu’au mien« . On voit par là qu’elle a intégré l’obligation faite aux femmes d’épouser des hommes qu’on leur impose. Mais en même temps, elle n’y met aucune ferveur. C’est dit de façon conventionnelle, par devoir et obligation. Elle fait croire et se fait croire que le mariage de Cécile avec Germont est une bonne chose. Elle le pense aussi peu qu’elle se pense heureuse. Plus tard, elle écrira à Valmont : « Je dois être heureuse« . Mais qui qui peut croire que le bonheur est un devoir ? Ce qui est sous-entendu c’est ceci : « il faut que je croie que j’ai fait un mariage heureux ».
En écrivant : « Que le bonheur de mademoiselle votre fille soit la récompense de celui que vous m’avez procuré« , Tourvel ne croit pas si bien dire. Le « bonheur » prévisible de Cécile mariée, s’il avait lieu, aurait valu le « bonheur » qu’elle partage avec son magistrat de mari (« bonheur » qui n’est en réalité que le « petit malheur ordinaire de vivre », formule de Freud pour dire que le bonheur consiste dans le deuil de l’idée de bonheur). Par ailleurs, elle dit de Valmont dont elle vient de faire la connaissance : « Je ne le connaissais que de réputation, et elle me faisait peu désirer de le connaître davantage ; mais il me semble qu’il vaut mieux qu’elle« . La fin de la phrase est le signe qu’elle est déjà disposée à le regarder d’un oeil aimable malgré sa réputation sulfureuse. Bref, c’est une lettre où le « faire croire » le dispute au « se faire croire ».
Lettre XI : De Tourvel à madame de Volanges au sujet de Valmont. Elle refuse de croire ce libertin foncièrement mauvais (ce refus est bien entendu dicté par sa passion amoureuse naissante) : « Ce redoutable M. de Valmont (…) paraît avoir déposé ses armes meurtrières (…). Elle ajoute : « C’est apparemment l’air de la campagne qui a produit ce miracle. » C’est plutôt le miracle de l’amour, celui-là même qui métamorphosera Valmont en un autre homme à la fin de roman. Toute cette lettre est un monument d’auto-tromperie : « si j’avais un frère, je désirerais qu’il fût tel que M. de Valmont se montre ici. « Elle se trompe doublement sur le compte de Merteuil, qu’elle juge prude et honnête, et sur ce qu’elle croit être l’amitié entre elle et Valmont.
Lettre XXII : de Tourvel à Madame de Volanges. Elle lui raconte ce qu’elle croit être une action généreuse de Valmont (Lettre XXI). Son coeur a besoin de croire en la vertu de Valmont puisqu’elle l’aime inconsciemment : pour parler comme Descombes, qui défend cette thèse dans L’inconscient malgré lui, ce n’est pas que Tourvel ne veuille pas (se) dire qu’elle aime Valmont, mais quelle ne sache pas (se) le dire : « ce n’est même plus seulement une compassion passagère et que l’occasion détermine, c’est le projet formé de faire du bien ; c’est la sollicitude de la bienfaisance ; c’est la plus belle vertu des plus belles âmes. » Valmont connaît la vérité de sa fourberie, (son action faussement altruiste), mais il connaît aussi celle du mensonge des intentions désintéressées (auxquelles il ne croit pas davantage que Nietzsche). Après avoir reconnu qu’elle « aime mieux croire que ces erreurs, pour être longues, ne sont pas éternelles » (la conduite libertine de Valmont qu’elle croit qu’il a abandonnée), ce qui est un aveu assez lucide sur son désir de crédulité envers Valmont, elle termine sur cette autre vérité qui échappe de sa plume : « M. de Valmont n’est peut-être qu’un exemple de plus du danger des liaisons. » (cette expression renvoie évidemment au titre du livre).
Lettre XXVI : de Tourvel à Valmont. Cette Lettre est en effet de « mauvaise foi », pour une fois au sens que Sartre prête à cette expression, qu’il reprend dans le chapitre « La mauvaise foi » de L’être et le néant (1943, réédition de 1961) : une femme qui se rend à un rendez-vous avec un homme. Elle souhaite à la fois être respectée et désirée, mais ne peut (s)’avouer clairement ni le premier but ni le second : « elle n’est pas au fait de ce qu’elle souhaite : elle est profondément sensible au désir qu’elle inspire, mais le désir cru et nu l’humilierait et lui ferait horreur. Pourtant, elle ne trouverait aucun charme à un respect qui serait uniquement du respect. Il faut, pour la satisfaire, un sentiment qui s’adresse tout entier à sa personne, c’est-à-dire à la liberté et qui soit une reconnaissance de sa liberté. » (ibid., p. 94) Cette analyse convient à merveille à cette Lettre de Tourvel. Car qu’écrit-elle ? « malgré la certitude où je suis de ne point vous aimer, de ne vous aimer jamais, peut-être aurais-je mieux fait de suivre les conseils de mes amis ; de ne pas vous laisser approcher de moi. (…)je ne voulais voir en vous que le neveu de ma plus respectable amie ; (…) Je m’en tiens, monsieur, à vous déclarer que vos sentiments m’offensent, que leur aveu m’outrage, et surtout que, loin d’en venir un jour à les partager, vous me forceriez à ne vous revoir jamais, si vous ne vous imposiez sur cet objet un silence qu’il me semble avoir droit d’attendre et même d’exiger de vous.« Connaissant la suite des événements, le lecteur sait que tout est faux dans ces justifications maladroites. Tourvel aime Valmont, mais elle ne sait que faire pour sortir de la contradiction terrible dans laquelle elle se débat : « consentir au flirt » (Sartre, au sujet de la femme si elle abandonne sa main à l’homme), ce serait trahir son respect des convenances et sa foi chrétienne, mais ne pas y consentir , ce serait trahir son amour pour lui.
Lettre XLI : de Tourvel à Valmont. Elle continue de croire qu’elle ne l’aime pas. Elle va lui demander de ne plus lui écrire, ce qu’il continuera de faire, et elle continuera de répondre à ses lettres… « j’ai même combattu leur avis tant que votre conduite à mon égard avait pu me faire croire que vous aviez bien voulu ne me pas confondre avec cette foule de femmes qui toutes ont eu à se plaindre de vous. » Elle dit ici une demi vérité : Valmont a bien fait croire à Tourvel qu’il ne la traiterait pas comme les autres femmes… ce qu’il croyait faire, et que finalement il n’a pas fait : Tourvel est la seule femme qu’il ait aimée et pour qui il va mourir. Quand elle lui dit « Prouvez-moi (…) que (…) les femmes honnêtes n’auront jamais à se plaindre de vous ; prouvez-moi, au moins, que quand vous avez des torts avec elles, vous savez les réparer« , il faut reconnaître que Valmont a presque réussi à lui prouver tout cela, et s’il n’a pu réparer, c’est que leur relation est empêchée par les principes de l’époque. C’est avec des actes, pas avec des mots, qu’on prouve, du moins dans le domaine des qualités, des principes et des valeurs : la preuve du courage, c’est l’acte courageux, non la phrase « je suis courageux ».
Lettre XLIII : de Tourvel a Valmont. Aveu lâché par Tourvel dans cette lettre : « quelle femme pourrait avouer être en correspondance avec vous ? » (elle sait donc que ce qu’elle fait serait jugé sévèrement par le monde auquel elle appartient… et pourtant elle le fait : peut-on vouloir croire quelque chose de peu crédible ou, ce qui est un peu différent, vouloir être trompé ?).
Lettre L : de Tourvel à Valmont. Au lieu de ne pas répondre, Tourvel persiste et signe. Elle lui écrit : « dans le moment même où vous croyez faire l’apologie de l’amour, que faites-vous au contraire, que m’en montrer les orages redoutables ? » N’est-ce pas une façon d’avouer sa propre crainte d’aimer ? C’est d’elle-même qu’elle parle lorsqu’elle écrit : « n’êtes-vous pas le premier à vous plaindre du trouble involontaire qu’il (l’amour) vous cause ? Quel ravage effrayant ne ferait-il donc pas sur un cœur neuf et sensible, qui ajouterait encore à son empire par la grandeur des sacrifices qu’il serait obligé de lui faire ? » Elle se connaît, et elle est bien consciente qu’elle risquerait gros à céder à Valmont et à son penchant pour lui. Elle en sait donc davantage que lui sur au moins ce point.
SECONDE PARTIE
Lettre LVI : de Tourvel à Valmont. Lettre bouleversante par le ton tourmenté que prend la présidente de Tourvel. C’est du romantisme, mais inversé, comme dans le film de David Lean, Brève rencontre (la page Wikipédia contient cette sotte remarque : « C’est le film romantique préféré de Natalie Portman » — car ce film, où les amants renoncent à leur passion pour ne pas détruire leurs deux vies conjugales est tout sauf romantique, puisque sa thèse peut se résumer ainsi : « Cette passion ne vaut pas la peine que nous allons nous infliger à nous-mêmes comme à nos mari et épouse respectifs ». Comme Natalie Portman, j’aime ce film, mais j’espère pour elle qu’elle n’a pas pensé et dit cette sottise).
La lettre débute par un aveu à peine voilé : « Supposé que vous m’aimiez véritablement (…), les obstacles qui nous séparent en seraient-ils moins insurmontables ? » Elle ne dit pas qu’elle ne l’aime pas, mais qu’il s’agit d’un amour qui leur coûtera trop cher (ce qu’elle dit est d’une cruelle exactitude). Elle ajoute : « il m’est impossible de le partager ; et quand même ce malheur m’arriverait, j’en serais plus à plaindre, sans que vous en fussiez plus heureux », aveu qui contient aussi la vérité de ce qui arrivera aux amants malheureux. Si Tourvel se laissera finalement embobiner par le baratin de Valmont — qui s’y prend lui-même pour devenir réellement amoureux — et aussi emporter par sa propre passion , elle garde la tête assez froide pour deviner les conséquences exactes d’un adultère. Vient un passage très révélateur de ce qu’elle éprouve pour son mari : « Chérie et estimée d’un mari que j’aime et respecte, mes devoirs et mes plaisirs se rassemblent dans le même objet. Je suis heureuse, et je dois l’être. » Michel Tournier a dit, je crois, qu’il n’y a d’amour que libre ; il en est de même du bonheur (choses que tout le monde sent aisément). Or, ici, nous avons une femme qui dit que ses plaisirs et ses devoirs sont liés, que son bonheur est un devoir. Il est clair que l’amour qu’elle éprouve pour son mari est pure convenance, construction mentale issue d’une soumission aux règles en vigueur (on était mariée à un homme plus âgé, qu’on n’aimait pas, pour lequel au mieux on avait du respect, au pire du dégoût voire de la haine, et qu’on trompait sûrement souvent pour atténuer son malheur). A propos de plaisir, Tourvel écrit : « En est-il de plus doux que d’être en paix avec soi-même » Ce en quoi elle a raison : mais c’est à quel prix qu’elle reste en paix avec elle-même ? au prix du renoncement à ce u’on pourrait appeler, de manière un peu romantique, le « véritable amour », celui-là même qu’elle aurait peut-être partagé avec Valmont s’ils s’étaient « librement »— car il n’y a aucune liberté dans la passion romantique, souvenons-nous de Tristan et Iseut, qui sont victimes d’un philtre d’amour — choisis. Suit un propos anti-romantique et, encore une fois, d’une froide exactitude quant à la prédiction qu’il contient : « Ce que vous appelez le bonheur, n’est qu’un tumulte des sens, un orage des passions dont le spectacle est effrayant, même à le regarder du rivage.Eh ! comment affronter ces tempêtes ? » La lettre se termine sur une injonction, davantage destinée à elle-même qu’à Valmont : « Cette lettre est la dernière que vous recevrez de moi. » (elle ne tiendra pas parole).
Lettre LXXVIII : de Tourvel à Valmont. Encore une Lettre d’une mauvaise foi évidente, de cette même mauvaise foi qui anime une femme qui se rend à un rendez-vous galant (voir ci-dessous), même si les états d’esprit des deux femmes sont différents. « j’ai pris le parti de me renfermer dans une indifférence (…) je veux bien entrer encore une fois en explication avec vous. » En acceptant de répondre, Tourvel montre à quel point elle n’est pas indifférente à Valmont. On m’a rapporté jadis cette histoire vraie : harcelé par une femme, un homme lui adressa une lettre et une seule, et qui contenait ces seuls mots : « OUBLIE MOI ! OUBLIE MOI ! OUBLIE MOI ! » Le message est simple, clair, ce qui explique que la lettre resta sans réponse. Pourquoi la Présidente Tourvel n’a-t-elle pas écrit la même chose à Valmont ? Parce qu’elle l’aime (et parce qu’il fallait bien que le roman se fasse ! Cet impératif explique aussi pourquoi Merteuil, dont le principe est de rester secrète, écrit tant). Et ce qui fait contrepoids n’est pas très lourd : « je n’oublierai jamais ce que je me dois, ce que je dois à des nœuds que j’ai formés, que je respecte et que je chéris« . L’amour, du moins l’amour-passion a peu à voir avec le devoir et le respect. Les noeuds qu’on forme n’ont rien à voir avec l’amour, qui est toujours librement consenti (comme la foi religieuse, qui ne saurait être contrainte). Seul l’amour conjugal, ce lien que Montaigne appelle « amitié maritale », parvient à faire fusionner désir et respect. Le texte qui suit est utile pour comprendre la mauvaise foi de Tourvel, attitude fondamentale de la conscience (selon Sartre) qu’il lui arrive de reconnaître implicitement : « vous faisant un droit de mon indulgence (…) permission, que, sans doute, je n’aurais pas dû accorder (…) chacune de vos lettres me faisait un devoir de ne plus vous répondre. (…) blâmez-moi plutôt de mon indulgence, étonnez-vous que je ne sois pas partie au moment de votre arrivée.« blâme et étonnement qu’elle devrait retourner contre elle-même). Voici des extraits du texte du rendez-vous imaginé par Sartre (déjà cité dans mon analyse de la Lettre XXVI) : « Elle sait fort bien les intentions que l’homme qui lui parle nourrit à son égard. Elle sait aussi qu’il lui faudra prendre tôt ou tard une décision. (…) C’est qu’elle n’est pas au fait de ce qu’elle souhaite : elle est profondément sensible au désir qu’elle inspire, mais le désir cru et nu l’humilierait et lui ferait horreur. Pourtant, elle ne trouverait aucun charme à un respect qui serait uniquement du respect. Il faut, pour la satisfaire, un sentiment qui s’adresse tout entier à sa personne, c’est-à-dire à sa liberté plénière, et qui soit une reconnaissance de sa liberté. » J.-P. Sartre, L’Être et le néant, I, ch. II « La mauvaise foi », Gallimard, 1943.
TROISIÈME PARTIE
Lettre XC : de Tourvel à Valmont. Contient un aveu quasi complet de son amour pour Valmont : »fuyons surtout ces entretiens particuliers et trop dangereux, où, par une inconcevable puissance, sans jamais parvenir à vous dire ce que je veux, je passe mon temps à écouter ce que je ne devrais pas entendre. » (je souligne : elle ne peut lui dire qu’elle l’aime et qu’elle ne veut pourtant pas s’engager, la contradiction étant flagrante). Elle ajoute : « Ne craignez pas que votre absence altère jamais mes sentiments pour vous : comment parviendrais-je à les vaincre, quand je n’ai plus le courage de les combattre ? Vous le voyez, je vous dis tout ; je crains moins d’avouer ma faiblesse que d’y succomber. » je souligne encore). Le problème, c’est qu’en avouant sa faiblesse, elle se prépare à succomber à ses sentiments. Elle a beau dire, « cet empire que j’ai perdu sur mes sentiments, je le conserverai sur mes actions« , la capitulation devant un sentiment entraîne (toujours ?) la capitulation dans l’action. Tout le tragique de la situation de Tourvel est dans la phrase qui suit : « Ah ! si, pour vous rendre heureux, il ne fallait que consentir à être malheureuse, vous pouvez m’en croire, je n’hésiterais pas un moment… Mais devenir coupable !… non, mon ami, non, plutôt mourir mille fois. » Tragique (au sens de la définition de Vladimir Jankélévitch : l’alliance du nécessaire et de l’impossible) car pour le rendre heureux, elle doit devenir à la fois malheureuse et coupable. Et peut-on être coupable sans être malheureux ? Et malheureux sans être coupable ? Seule l’innocence donne la béatitude. Tourvel y goûtera un temps très bref, consentante, dans les bras de Valmont.
Lettre CII : De Tourvel à madame de Rosemonde. Elle avoue dans cette Lettre son amour pour Valmont : « J’aime, oui, j’aime éperdument. » Elle fuit, bien que tout la pousse à se jeter dans les bras de Valmont. Mais « il vaut mieux mourir que de vivre coupable. » C’est ce qui lui arrivera, et on devine qu’elle prévoit déjà sa fin : « Que m’est-elle (la vie) sans lui ? ne serais-je pas trop heureuse de la perdre ? Condamnée à faire éternellement son malheur et le mien ; à n’oser ni me plaindre, ni le consoler ; à me défendre chaque jour contre lui, contre moi-même ; à mettre mes soins à causer sa peine, quand je voudrais les consacrer tous à son bonheur : vivre ainsi n’est-ce pas mourir mille fois ? » Tourvel est consciente que leur amour est sans avenir dans l’ancien régime. La fin de la Lettre montre que le couple Tourvel/Rosemonde fait miroir au couple Cécile/Merteuil (l’un étant fondé sur la bonté et la sincérité, l’autre sur la méchanceté et le mensonge).
Lettre CVIII : de Tourvel à madame de Rosemonde. Lettre qui contient une longue plainte, de celles qu’on appelait jadis « délectation morose » (les psychiatres du début du 20e) : « Être soi-même l’artisan de son malheur« . Tourvel a l’honnêteté de reconnaître cette vérité (c’est ainsi qu’en parle aussi Diderot : nous sommes responsables de notre crédulité ; idée chère aux stoïciens pour qui nous nous maîtres de nos jugements), qui entraîne, de facto, que Valmont n’est responsable que de sa partie : désir, séduction, tromperie, passion amoureuse, et mort en duel. À la fin de la lettre, elle évoque une lettre de Valmont : « J’ai bien encore là sa lettre… ; mais vous êtes sûrement de mon avis, je ne dois pas l’ouvrir » : si elle ne la détruit pas aussitôt, c’est qu’elle se ment. Il y a donc dans cette lettre des vérités et des mensonges que Tourvel fabrique pour elle-même.
Lettre CXIV : de Tourvel à madame de Rosemonde. Lettre remplie d’inquiétude pour l’état de Valmont. Elle se laisse tromper avec une facilité que seul son amour pour lui peut expliquer sinon excuser. Parlant de sa réclusion dans sa chambre (ce qui n’est qu’un stratagème), elle écrit : »Il n’est pas rare que la mélancolie et le dégoût du monde soient des symptômes avant-coureurs de quelque maladie grave« . Sans le savoir, et bien que trompée, Tourvel perçoit bien la vérité de ce qui la menace. Pressentant les malheurs qui fondent sur elle : « je sens que je suis née pour les éprouver tous.«
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