Commentaire du chapitre XX du Traité théologico-politique de Spinoza

Où l’on montre que dans un État libre il est loisible à chacun de penser ce qu’il veut et de dire ce qu’il pense.

Statue de Spinoza en bronze du sculpteur Nicolas Dings qu’on peut voir à Amsterdam. On peut lire la fin de la phrase inscrite sur le socle : « Het doel van de staat is de vrijheid » (« La fin de l’État est donc en réalité la liberté. » Cette phrase se trouve à la fin du [6] du chapitre XX (p. 193)

p. 189 :

[1] S’il était aussi facile de commander aux âmes qu’aux langues, il n’y aurait aucun souverain qui ne régnât en sécurité et il n’y aurait pas de gouvernement violent, car chacun vivrait selon la complexion des détenteurs du pouvoir et ne jugerait que d’après leurs décrets du vrai ou du faux, du bien ou du mal, du juste ou de l’inique. Mais, comme nous l’avons fait observer au commencement du chapitre XVII, cela ne peut être ; il ne peut se faire que l’âme d’un homme appartienne entièrement à un autre ; personne en effet ne peut transférer à un autre, ni être contraint d’abandonner son droit naturel ou sa faculté de faire de sa raison un libre usage et de juger de toutes choses.

(on peut faire taire un individu, par la menace, la prison et la mort. Mais nul ne peut l’empêcher de penser ce qui lui plaît qu’il s’agisse de pensées raisonnables ou démentes. C’est pourquoi un gouvernement non violent et une communauté humaine sûre sont impossibles à mettre en place. Depuis le 17e siècle, des « progrès » ont été accomplis dans le domaine du « commandement des âmes », grâce à la cybernétique, ou informatique (du verbe former) dont le dernier développement s’appelle I.A. en français abrégéa. L’étymologie est kubernatis, « timonier » ou « pilote » en grec, qui a donné gouvernement et gouvernail. Bernays, neveu de Freud, inventeur de ce qu’il appelle « ingénierie du consentement » – dans son livre Propaganda, 1928 – appelait de ses voeux ce gouvernement invisible : « La manipulation consciente et intelligente des actions et des opinions des masses est un élément important dans une société démocratique. Ceux qui manipulent ce mécanisme invisible de la société, constituent un gouvernement invisible qui est le vrai pouvoir dans notre pays. Nous sommes gouvernés, nos esprits sont formés, nos goûts éduqués, nos idées suggérées, en grande partie par des hommes, dont nous n’avons jamais entendu parler. » Voilà qui avait le mérite d’être clair et pourrait donner en partie raison à quelques théories dites « complotistes ». La cause principale de cet ajournement perpétuel de la société idéale n’est autre que l’individu irrationnel, dominé par ses appétits, son imagination, ses passions. On peut le conduire – mieux que l’individu rationnel qui se conduit tout seul, et mieux – en bien comme en mal, avec la famille, l’école, la religion, les médias, etc. Il reste cependant toujours une part incontrôlable, qui fait les délinquants, les criminels, les déviants de toutes sortes, et les surprises de l’histoire)

Ce gouvernement par suite est tenu pour violent, qui prétend dominer sur les âmes ; et une majesté souveraine paraît agir injustement contre ses sujets et usurper leur droit, quand elle veut prescrire à chacun ce qu’il doit admettre comme vrai ou rejeter comme faux, et aussi quelles opinions doivent émouvoir son âme de dévotion…

p. 190 :

…envers Dieu : car ces choses sont du droit propre de chacun, un droit dont personne, le voulût-il, ne peut se dessaisir.

(on peut donc dire que tout gouvernement qui tente de dominer – qui n’est pas conduire, même si ducere, conduire en latin, et führer, dirigeant en allemand sont de sinistre mémoire – glisse vers la violence, car c’est faire violence à un individu que de vouloir lui faire penser ce qu’on veut qu’il pense. 1984 d’Orwell en est une illustration. C’est aussi un gouvernement qui ne peut qu’échouer puisque cet objectif ne peut jamais être tout à fait atteint. La deuxième remarque soulignée rappelle une chose qu’on a tendance à oublier – oubli qui explique l’indignation devant les thèses complotistes, révisionnistes et négationnistes : on ne peut forcer un individu à admettre comme vraie une chose vraie, ni comme fausse une chose fausse, ni même une chose vraie comme fausse et une chjose fausse comme vraie. Ayant déjà évoqué cette idée dans un précédent article ce qu’en dit Descombes, je développe a minima. Descombes dit qu’aucune société ne peut être constituée seulement d’automates – Spinoza dit dans le Traité de la réforme de l’entendement – écrit inachevé qui date des années 1665-1670 – que l’homme est un « automate spirituel ». Je cite la phrase où elle apparaît une unique fois dans son oeuvre (un hapax, de hápax legómenon). L’homme est doté d’une « âme agissant selon des lois déterminées et comme un automate spirituel. expression qui me semble valoir pour l’individu libéré des préjugés comme pour l’individu plongé dans ceux-ci, contrairement à ce que dit l’auteur d’un article consacré à cette formule. Descombes nie aussi que puisse exister une société constituée seulement de sujets autonomes, individus considérés comme « supérieurs » aux individus moyens, plus ou moins pris dans l’hétéronomie)

[2] Je le reconnais, plus d’un a l’esprit occupé de préjugés tels et de si incroyable façon que, tout en n’étant pas directement placé sous le commandement d’un autre, il est suspendu à la parole de cet autre à ce point qu’on peut dire justement qu’il appartient à cet autre, en tant qu’être pensant ; quelque soumission toutefois que par certains artifices on arrive à obtenir, encore n’a-t-on jamais fait que les hommes aient cessé d’éprouver que chacun abonde dans son propre sens et qu’entre les têtes la différence n’est pas moindre qu’entre les palais.

(on peut certes diriger presque entièrement un individu – c’est le cas du fanatique qui vénère son idole humaine – mais le cas paraît marginal. Je donnais souvent le contre-exemple suivant à mes élèves : durant toute la 2ème guerre mondiale, 3000 juifs furent cachés à Berlin malgré la propagande nazie et les risques encourus – d’après un livre d’histoire dont j’ai oublié le titre et l’auteur. La plupart du temps, chacun conserve une certaine indépendance qui lui permet de critiquer celui-là même qu’il admirait, voire trahir celui qui le fascinait : « chacun abonde dans son propre sens » rappelle l’expression populaire, d’une certaine profondeur psychologique en dépit de son apparence triviale : « C’est mon avis et je le partage »)

Moïse qui, non par la fourberie, mais par sa vertu divine, s’était si bien emparé du jugement de son peuple, d’autant qu’on croyait ses paroles et tous ses actes inspirés par Dieu, ne put cependant échapper ni aux rumeurs ni aux interprétations défavorables ; encore bien moins les autres…

p. 191 :

(…)

[3] Si grand donc que soit le droit attribué au souverain sur toutes choses et tout interprète du droit et de la piété qu’on le croit, encore ne pourra-t-il jamais se dérober à la nécessité de souffrir que les hommes jugent de toutes choses suivant leur complexion propre et soient affectés aussi de tel affect ou tel autre. Il est bien vrai qu’il peut en droit tenir pour ennemis tous ceux qui, en toutes matières, ne pensent pas entièrement comme lui ; mais la discussion ne porte plus sur son droit, elle porte sur ce qui lui est utile. (…)

[4] Si donc personne ne peut renoncer à la liberté de juger et d’opiner comme il veut, et si…

p. 192 :

(…)

[5] (…)

[6] (…)

p. 193 :

…institué ; au contraire c’est pour libérer l’individu de la crainte, pour qu’il vive autant que possible en sécurité, c’est-à-dire conserve, aussi bien qu’il se pourra, sans dommage pour autrui, son droit naturel d’exister et d’agir. Non, je le répète, la fin de l’État n’est pas de faire passer les hommes de la condition d’êtres raisonnables à celle de bêtes brutes ou d’automates, mais au contraire il est institué pour que leur âme et leur corps s’acquittent en sûreté de toutes leurs fonctions, pour qu’eux-mêmes usent d’une raison libre, pour qu’ils ne luttent point de haine, de colère ou de ruse, pour qu’ils se supportent sans malveillance les uns les autres. La fin de l’État est donc en réalité la liberté.

(« fin de l’État » n’est pas à entendre ici au sens d’une finalité qui devrait arriver tôt ou tard – Spinoza rejette le concept de finalité – mais au sens de but de ce qu’on pourrait appeler État « idéal », celui que Spinoza appelle de ses voeux, l’État démocratique. Si Spinoza pouvait connaître les États les plus autoritaires du 20e siècle, ceux de l’Allemagne de Hitler et de l’URSS de Staline, il ne se dédierait pas pour autant. Cet État est celui où chacun peut trouver sa félicité où bon lui semble, avec cette nuance que jamais les individus ne parviendront tous à considérer la réalité de la même façon rationnelle. Je sais que d’autres philosophes me critiqueront et pensent qu’il y a un optimisme spinoziste, comme il y a un optimisme hégélien, et que tout finira par s’arranger à la fin de l’histoire, ce qui me semble assez peu spinoziste… mais c’est peut-être moi qui suis à ranger parmi les tragiques ou les pessimistes…Ceci dit, Rovere dit dans la note relative à cette phrase : « le but de l’État est de fournir un cadre favorisant une vie heureuse et sage, sans pourtant imposer le bonheur ou la sagesse, puisque ce serait impossible. » Je souscris à ce propos. Si la sagesse doit venir aux individus, ce sera l’un après l’autre, ce qui laisse beaucoup d’avenir à la déraison)

[7] (…)

p. 194 :

…savoir et qu’il est impossible que tous opinent pareillement et parlent d’une seule bouche, ils ne pourraient vivre en paix si l’individu n’avait renoncé à son droit d’agir suivant le seul décret de sa pensée. C’est donc seulement au droit d’agir par son propre décret qu’il a renoncé, non au droit de raisonner et de juger. 

Par suite nul à la vérité ne peut, sans danger pour le droit du souverain, agir contre son décret, mais il peut avec une entière liberté opiner et juger et en conséquence aussi parler, pourvu qu’il n’aille pas au-delà de la simple parole ou de l’enseignement, et qu’il défende son opinion par la raison seule ; non par la ruse, la colère ou la haine, ni dans l’intention de changer quoi que ce soit dans l’État de l’autorité de son propre décret.

(Spinoza envisage donc des limites à l’expression de la pensée : limites qui nous paraissent justes, comme l’interdiction de l’expression de la haine, ou celle de toute parole mue par « l’intention de changer quoi que ce soit dans l’État de l’autorité de son propre décret », si cela veut bien dire appeler à la sédition et au renversement de l’État par la violence).

Par exemple, en cas qu’un homme montre qu’une loi contredit à la raison, et qu’il exprime l’avis qu’elle doit être abrogée, si, en même temps, il soumet son opinion au jugement du souverain (à qui seul il appartient de faire et d’abroger des lois) et qu’il s’abstienne, en attendant, de toute action contraire à ce qui est prescrit par cette loi, certes il mérite bien de l’État et agit comme le meilleur des citoyens ; au contraire, s’il le fait pour accuser le magistrat d’iniquité et le rendre odieux, ou tente séditieusement d’abroger cette loi malgré le magistrat, il est tout à fait un perturbateur et un rebelle.

p. 195 :

[8] Nous voyons donc suivant quelle règle chacun, sans danger pour le droit et l’autorité du souverain, c’est-à-dire pour la paix de l’État, peut dire et enseigner ce qu’il pense ; c’est à la condition qu’il laisse au souverain le soin de décréter sur toutes actions, et s’abstienne d’en accomplir aucune contre ce décret, même s’il lui faut souvent agir en opposition avec ce qu’il juge et professe qui est bon. Et il peut le faire sans péril pour la justice et la piété ; je dis plus, il doit le faire, s’il veut se montrer juste et pieux ; car, nous l’avons montré, la justice dépend du seul décret du souverain et, par suite, nul ne peut être juste s’il ne vit pas selon les décrets rendus par le souverain.

(aucun esprit contestataire, au sens où on entend ce mot aujourd’hui, n’accordera cela à Spinoza – ce qui me fait souvent dire qu’il est difficile de tirer Spinoza au-delà de ce qu’on appelle le « centre » en politique, ou l’idéologie libérale, au double sens philosophique et politique… et peut-être même économique. Sauf si cet esprit contestataire reconnaît que pour l’essentiel – travailler, consommer, conduire sa voiture, se faire accorder un crédit par une banque, etc. – il obéit aux lois de son pays)

Quant à la piété, la plus haute sorte en est (d’après ce que nous avons montré dans le précédent chapitre) celle qui s’exerce en vue de la paix et de la tranquillité de l’État ; or elle ne peut se maintenir si chacun doit vivre selon le jugement particulier de sa pensée. Il est donc impie de faire quelque chose selon son jugement propre contre le décret du souverain de qui l’on est sujet, puisque, si tout le monde se le permettait, la ruine de l’État s’ensuivrait. On n’agit même jamais contrairement au décret et à l’injonction de sa propre raison, aussi longtemps qu’on agit suivant les décrets du souverain, car c’est par le conseil même de la raison qu’on a décidé de transférer au souverain son droit d’agir d’après son propre jugement. Nous pouvons donner de cette vérité une confirmation tirée de la…

(cela non plus ne sera pas accordé à Spinoza par une idéologie révolutionnaire qui, par définition, tente de renverser l’État pour transformer ou remplacer les fondements de la société, « changer la vie », etc.)

p. 196 :

…pratique : dans les conseils, en effet, que leur pouvoir soit ou ne soit pas souverain, il est rare qu’une décision soit prise à l’unanimité des suffrages, et cependant tout décret est rendu par la totalité des membres aussi bien par ceux qui ont voté contre que par ceux qui ont voté pour

[9] Mais je reviens à mon propos. Nous venons de voir, en nous reportant aux fondements de l’État, suivant quelle règle l’individu peut user de la liberté de son jugement sans danger pour le droit du souverain. Il n’est pas moins aisé de déterminer de même quelles opinions sont séditieuses dans l’État : ce sont celles qu’on ne peut poser sans lever le pacte par lequel l’individu a renoncé à son droit d’agir selon son propre jugement : cette opinion, par, exemple, que le souverain n’est pas indépendant en droit ; ou que personne ne doit tenir ses promesses ; ou qu’il faut que chacun vive d’après son propre jugement ; et d’autres semblables qui contredisent directement à ce pacte. Celui qui pense ainsi est séditieux, non pas à raison du jugement qu’il porte et de son opinion considérée en elle-même, mais à cause de l’action qui s’y trouve impliquée : par cela même qu’on pense ainsi, en effet, on rompt tacitement ou expressément la foi due au souverain.

(ce n’est pas tant la pensée qui est dangereuse que l’action qu’elle entraîne. Seules les oeuvres sont réellement utiles ou nuisibles à la communauté. Par conséquent, une pensée qui est exprimée et qui peut conduire à une action nuisible peut être réprimée parce que séditieuse. On notera que l’interprétation de cette idée peut être exploitée à des fins autoritaires et totalitaires)

Par suite, les autres opinions qui n’impliquent point une action telle que rupture du pacte, vengeance, colère, etc., ne sont pas séditieuses, si ce n’est dans un État en quelque mesure corrompu ;…

(on a ici une limite de la pensée politique de Spinoza, du fait de son rationalisme – bien qu’il ne soit pas du tout rationaliste dans sa conception de la nature humaine, du droit naturel et des conditions inévitables dans lesquelles existe la politique – il suffit pour cela de lire le Traité politique : « 1.5. les hommes sont nécessairement sujets aux passions, et que leur nature est ainsi faite qu’ils doivent éprouver de la pitié pour les malheureux et de l’envie pour les heureux, incliner vers la vengeance plus que vers la miséricorde ; enfin chacun ne peut s’empêcher de désirer que ses semblables vivent à sa guise, approuvent ce qui lui agrée et repoussent ce qui lui déplaît. D’où il arrive que tous désirant être les premiers, une lutte s’engage, on cherche à s’opprimer réciproquement, et le vainqueur est plus glorieux du tort fait à autrui que de l’avantage recueilli pour soi. Et quoique tous soient persuadés que la religion nous enseigne au contraire à aimer son prochain comme soi-même, par conséquent à défendre le bien d’autrui comme le sien propre, j’ai fait voir que cette persuasion a peu d’empire sur les passions. 1.6. L’État sera donc très-peu stable, lorsque son salut dépendra de l’honnêteté d’un individu et que les affaires ne pourront y être bien conduites qu’à condition d’être dans des mains honnêtes. » Il est donc impossible d’affirmer qu’il exclut du champ politique les passions humaines, telles que l’amour excessif, la haine, l’enthousiasme, l’exaltation, la vengeance, qui sont des composantes inévitables des conduites humaines. Avec Machiavel et Hobbes, puis après lui Hegel, Spinoza inclut tous les affects dans sa conception de la politique, parce qu’ils doivent justement déterminer la « bonne » politique – réaliste ou machiavélienne. La tentation d’évacuer de l’action politique de prétendus « mauvais » affects conduit à l’impuissance, voire au pire…)

p. 197 :

 …c’est-à-dire où des fanatiques et des ambitieux qui ne peuvent supporter les hommes de caractère indépendant ont réussi à se faire une renommée telle que leur autorité l’emporte dans la foule sur celle du souverain. Nous ne nions pas cependant qu’il n’y ait en outre des opinions qu’il est malhonnête de proposer et de répandre, encore qu’elles semblent avoir seulement le caractère d’opinions vraies ou fausses. Nous avons déjà, au chapitre XV, déterminé quelles elles étaient, en prenant soin de ne porter aucune atteinte à la liberté de la raison. 

Et si enfin nous considérons que la fidélité envers l’État comme envers Dieu se connaît aux œuvres seules, c’est-à-dire à la piété envers le prochain, nous reconnaîtrons sans hésiter que l’État le meilleur concède à l’individu la même liberté que nous avons fait voir que lui laissait la foi. 

[10] Je le reconnais, une telle liberté peut avoir ses inconvénients ; mais y eut-il jamais aucune…

p. 198 :

institution si sage que nuls inconvénients n’en pussent naître ? Vouloir tout régler par des lois, c’est irriter les vices plutôt que les corriger. Ce que l’on ne peut prohiber, il faut nécessairement le permettre, en dépit du dommage qui souvent peut en résulter. Quels ne sont pas les maux ayant leur origine dans le luxe, l’envie, l’avidité, l’ivrognerie et autres passions semblables ? On les supporte cependant parce qu’on ne peut les prohiber par le pouvoir des lois et bien que ce soient réellement des vices ; encore bien plus la liberté du jugement, qui est en réalité une vertu, doit-elle être admise et ne peut-elle être comprimée. Ajoutons qu’elle n’engendre pas d’inconvénients que l’autorité des magistrats (je vais le montrer) ne puisse éviter ; pour ne rien dire ici de la nécessité première de cette liberté pour l’avancement des sciences et des arts ; car les sciences et les arts ne peuvent être cultivés avec un heureux succès que par ceux dont le jugement est libre et entièrement affranchi.

(Ce défaut qu’on peut appeler inflation de lois – la France est championne en ce domaine – me rappelle une formule célèbre de Rousseau, qui va à l’encontre de ce vice politique – que je cite de mémoire : « Simplement, n’opprimez pas, chacun trouvera bien sa félicité« )

[11] Admettons cependant que cette liberté peut être comprimée et qu’il est possible de tenir les hommes dans une dépendance telle qu’ils n’osent pas proférer une parole, sinon par la prescription du souverain ; encore n’obtiendra-t-il jamais qu’ils n’aient de pensées que celles qu’il aura voulu ; et ainsi, par une conséquence nécessaire, les hommes ne cesseraient d’avoir des opinions en désaccord avec leur langage et la bonne foi, cette première…

p. 199 :

…nécessité de l’État, se corromprait ; l’encouragement donné à la détestable adulation et à la perfidie amènerait le règne de la fourberie et la corruption de toutes les relations sociales. 

Tant s’en faut d’ailleurs qu’il soit jamais possible de l’obtenir ; on ne fera point que tous répètent toujours la leçon faite ; au contraire, plus on prendra de soin pour ravir aux hommes la liberté de la parole, plus obstinément ils résisteront, non pas les avides, les flatteurs et les autres hommes sans force morale, pour qui le salut suprême consiste à contempler des écus dans une cassette et à avoir le ventre trop rempli, mais ceux à qui une bonne éducation, la pureté des mœurs et la vertu donnent un peu de liberté. Les hommes sont ainsi faits qu’ils ne supportent rien plus malaisément que de voir les opinions qu’ils croient vraies tenues pour criminelles, et imputé à méfait ce qui émeut leurs âmes à la piété envers Dieu et les hommes ; par où il arrive qu’ils en viennent à détester les lois, à tout oser contre les magistrats, à juger non pas honteux, mais très beau, d’émouvoir des séditions pour une telle cause et de tenter quelle entreprise violente que ce soit. Puis donc que telle est la nature humaine, il est évident que les lois concernant les opinions menacent non les criminels, mais les hommes de caractère indépendant, qu’elles sont faites moins pour contenir les méchants que pour irriter les plus honnêtes, et qu’elles ne peuvent être

p. 200 :

maintenues en conséquence sans grand danger pour l’État.

(Première remarque : Spinoza, avec beaucoup de bon sens, rappelle que les individus ne supportent rien moins que de voir considérées comme criminelles leurs opinions. C’est malheureusement une tendance à notre époque, qui engendre des tensions inquiétantes entre les citoyens. Deuxième remarque : Spinoza n’a pas en vue la défense de tous les individus, pour lesquels la vérité est loin d’être le but de leur vie, mais seulement de ceux qui recherchent la vérité, car ce sont eux qui sont menacés. Vincent Descombes rappelle que la société ne sera jamais une « société savante », où les discussions seraient toujours rationnelles, de bonne foi et en quête de la vérité. Il y a trois sortes d’individus : 1)- ceux qui doivent être réprimés – les criminels, les insensés -, 2)- ceux qu’on peut laisser tranquilles – les individus ordinaires qui ont des opinions non séditieuses – 3)- la minorité d’individus qui recherchent la vérité, sans danger pour l’État – sauf fondé sur des bases fausses comme le nazisme et le communisme -, qui méritent d’être encouragés et surtout protégés de ceux qui menacent leur liberté de penser, surtout les activistes religieux)

[12] Ajoutons que de telles lois condamnant des opinions sont totalement inutiles : ceux qui jugent saines les opinions condamnées ne peuvent obéir à ces lois; à ceux qui au contraire les rejettent comme fausses, ces lois paraîtront conférer un privilège et ils en concevront un tel orgueil que plus tard, même le voulant, les magistrats ne pourraient les abroger.

(un individu – Spinoza pense aux esprits savants – croyant un opinion proscrite continuera d’y croire, et un individu – Spinoza pense aux esprits bornés et ignorants – qui déteste ces opinions condamnées, se croira supérieurement intelligent. Il s’agit donc d’une loi inutile comme il existe des droits inutiles. J’ai parlé dans l’article sur le chapitre XIX du « droit de résistance ». Je rappelle ce passage : « la Constitution montagnarde de 1793 contenait l’article 35 qui créait un droit de résistance : « Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l’insurrection est, pour le peuple et pour chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs« )

À quoi il faut joindre encore ces conclusions tirées au chapitre XVIII en deuxième lieu de l’histoire des Hébreux. Combien de schismes enfin sont nés dans l’Église surtout de ce que les magistrats ont voulu mettre fin par des lois aux controverses des docteurs ! Si en effet les hommes n’étaient pas dominés par l’espoir de tirer à eux les lois et les magistrats, de triompher de leurs adversaires aux applaudissements du vulgaire, et de recueillir des honneurs, ils ne se combattraient pas avec tant de malveillance, leurs âmes ne seraient pas agitées d’une telle fureur. Cela non seulement la raison, mais l’expérience l’enseigne par des exemples quotidiens ; de telles lois en effet, commandant ce que chacun doit croire et interdisant de rien dire ou écrire contre telle opinion ou telle autre, ont été souvent instituées en manière de satisfaction ou plutôt de concession à la colère des hommes incapables de souffrir aucune fierté de caractère et qui aisément, par une sorte de malfaisant prestige,…

p. 201 :

…peuvent tourner en rage la dévotion de la foule séditieuse et l’exciter contre ceux qu’ils lui désignent. 

[13] Combien ne vaudrait-il pas mieux contenir la colère et la fureur du vulgaire que d’établir des lois dont les seuls violateurs possibles sont les amis des arts et de la vertu, et de réduire l’État à cette extrémité qu’il ne puisse supporter les hommes d’âme fière ! Quelle pire condition concevoir pour l’État que celle où des hommes de vie droite, parce qu’ils ont des opinions dissidentes et ne savent pas dissimuler, sont envoyés en exil comme des malfaiteurs ? Quoi de plus pernicieux, je le…

p. 202 :

…répète, que de tenir pour ennemis et de conduire à la mort des hommes auxquels on n’a ni crime ni forfait à reprocher, simplement parce qu’ils ont quelque fierté de caractère, et de faire ainsi du lieu de supplice, épouvante du méchant, le théâtre éclatant où, pour la honte du souverain, se voient les plus beaux exemples d’endurance et de courage ? Qui sait en effet qu’il est, dans sa conduite, irréprochable, ne craint pas la mort comme un criminel et ne se sauve pas du supplice par des implorations ; car le remords d’aucune vilenie ne torture son âme ; il est honorable à ses yeux, non infamant, de mourir pour la bonne cause, glorieux de donner sa vie pour la liberté. Quel exemple de tels hommes peuvent-ils donner par une mort, dont la cause est ignorée des âmes oiseuses et sans force, haïe des séditieux, aimée des meilleurs? Certes nul n’y apprendra rien qu’à les imiter s’il ne veut aduler. 

[14] Pour que la fidélité donc et non la complaisance soit jugée digne d’estime, pour que le pouvoir du souverain ne souffre aucune diminution, n’ait aucune concession à faire aux séditieux, il faut nécessairement accorder aux hommes la liberté du jugement et les gouverner de telle sorte que, professant ouvertement des opinions diverses et opposées, ils vivent cependant dans la concorde. Et nous ne pouvons douter que cette règle de gouvernement ne soit la meilleure, puisqu’elle s’accorde le…

(ce que la démocratie réalise, ce qui lui permet, c’est Raymond Aron qui faisait cette remarque, d’empêcher toute révolution, sans même avoir besoin de réprimer les opinions en faveur de thèses révolutionnaires. En cela, la démocratie moderne est allée plus loin que ce préconisait Spinoza. Il y a bien des scissions dans le peuple, des affrontements idéologiques, voire des polarisations brutales, mais rien qui conduise à une guerre civile, le pire des maux en politique. Mais affirmer qu’il n’y aura jamais de révolution en pays démocratique est un pari risqué : l’avenir dure longtemps, disait Louis Althusser – titre de son autobiographie)

p. 203 :

…mieux avec la nature humaine. Dans un État démocratique (c’est celui qui rejoint le mieux l’état de nature) nous avons montré que tous conviennent d’agir par un commun décret, mais non de juger et de raisonner en commun ; c’est-à-dire, comme les hommes ne peuvent penser exactement de même, ils sont convenus de donner force de décret à l’avis qui rallierait le plus grand nombre de suffrages, se réservant l’autorité d’abroger les décisions prises sitôt qu’une décision meilleure leur paraîtrait pouvoir être prise. Moins il est laissé aux hommes de liberté de juger, plus on s’écarte de l’état le plus naturel, et plus le gouvernement a de violence.

(cette formule est évidemment surprenante par le rapprochement entre état de nature et démocratie. C’est parce que Spinoza ne pense pas l’état de nature comme Hobbes avant lui (« guerre de tous contre tous »), et Hegel après lui (« état misérable qu’il faut quitter »). Il pense la démocratie comme régime politique où les hommes sont libres de penser et de dire ce qu’ils veulent. Or, ce droit naturel a toujours existé et ne peut être détruit. Donc, chacun, éduqué, ayant appris à tolérer les opinions des autres, se trouve dans cet état démocratique comme il était dans l’état de nature, la violence individuelle en moins – du fait du renoncement à son droit illimité sur toutes choses. Spinoza ne va pas jusqu’à rêver d’une humanité où tous les hommes jugeraient et raisonneraient selon les mêmes critères rationnels. La dernière remarque rappelle une fois de plus l’importance qu’il y a de laisser chacun juger en toute liberté, afin de ne pas aller contre la nature humaine – chacun pense selon ses propres penchants -, ce qui mène l’État à exercer la violence, symptôme d’un éloignement de l’état le plus naturel)

[15] (…)

p. 204 : (…)

p. 205 :

…établies sur la religion, c’est-à-dire pour mettre fin aux controverses, irritent les hommes plus qu’elles ne les corrigent ; et aussi que d’autres hommes usent de ces lois pour prendre toute sorte de licences ; et, en outre, que les schismes ne naissent pas d’un grand zèle pour la vérité (ce zèle est, au contraire, une source de bienveillance et de mansuétude), mais d’un grand appétit de régner.

(dès que les hommes visent le pouvoir plutôt que la vérité, c’est cette dernière qui en pâtit. Au contraire, dans une « société savante », telle la Royal Society anglaise, qui eut Isaac Newton comme président, et dont la devise est Nullius in verba, qui signifie « ne croire personne sur parole », la quête commune de la vérité tend à engendrer des rapports humains non violents. Comme je l’ai déjà dit, ce sont ces hommes qui ont besoin d’être protégés de ces autres hommes assoiffés de pouvoir plutôt que de vérité)

Par là il est établi, avec une clarté plus grande que la lumière du jour, que les schismatiques sont bien plutôt ceux qui condamnent les écrits des autres et excitent contre les auteurs le vulgaire turbulent, que les auteurs eux-mêmes qui, le plus souvent, écrivent pour les doctes seulement et demandent le secours de la seule raison ; en second lieu, que les vrais perturbateurs sont ceux qui, dans un État libre, veulent détruire la liberté du jugement qu’il est impossible de comprimer.

(ici se devine encore la distinction qu’établit Spinoza entre les individus savants et en quête de connaissances et les individus ignorants et brutaux. L’une des fonctions de la démocratie est de protéger les premiers des seconds. C’est ce qui me fait dire que Spinoza n’a pas du tout une conception monolithique de l’individu : tout individu ne mérite d’être défendu que s’il est menacé dans sa liberté de penser et de s’exprimer. Or, l’individu ordinaire n’ayant que des opinions, n’est ni menaçant ni menacé. En revanche, certains individus sont porteurs d’opinions menaçantes, et d’autres d’opinions menacées. Il existe donc une catégorie d’individus à défendre et une autre à combattre. Et ce ne sont pas les premiers qui menacent l’ordre public, mais les seconds)

[16] Nous avons ainsi montré

qu’il est impossible d’enlever aux hommes la liberté de dire ce qu’ils pensent ;…

p. 206 :

…2° que cette liberté peut être reconnue à l’individu sans danger pour le droit et l’autorité du souverain et que l’individu peut la conserver sans danger pour ce droit, s’il n’en tire point licence de changer quoi que ce soit aux droits reconnus dans l’État ou de rien entreprendre contre les lois établies

que l’individu peut posséder cette liberté sans danger pour la paix de l’État et qu’elle n’engendre pas d’inconvénients dont la réduction ne soit aisée

que la jouissance de cette liberté donnée à l’individu est sans danger pour la piété ;

(ce début de récapitulatif insiste surtout sur les droits de l’individu – pas tous, comme je l’ai déjà dit, mais de ceux qui doivent être protégés prioritairement, les savants qui cherchent honnêtement la vérité, et dont les principaux ennemis sont des doctrinaires religieux)

que les lois établies sur les matières d’ordre spéculatif sont totalement inutiles ;

(les hommes qui spéculent – qui font de la philosophie, des sciences – ne font pas de politique et ne sont pas dangereux ; donc, légiférer dans le domaine des sciences st sans intérêt. Les choses ont un peu changé de nos jours : certains parmi ceux qui sont reconnus comme savants se sentent parfois habilités à donner leur opinion en politique, voire à gouverner les hommes. Ils souffrent de ce qui est appelé « maladie du Nobel« )

6° nous avons montré enfin que non seulement cette liberté peut être accordée sans que la paix de l’État, la piété et le droit du souverain soient menacés, mais que, pour leur conservation, elle doit l’être. Où, en effet, les hommes s’efforcent de ravir cette liberté à leurs adversaires, où les opinions des dissidents, non les âmes, seules capables de péché, sont appelées devant les tribunaux, des exemples sont faits, qui semblent plutôt des martyres d’hommes honnêtes, et qui produisent plus d’irritation, excitent plus à la miséricorde, sinon à la vengeance, qu’ils n’inspirent d’effroi. Puis les relations sociales et la bonne foi se corrompent, l’adulation et la perfidie sont encouragées et les adversaires des condamnés s’enorgueillissent, parce qu’on a eu complaisance pour leur colère et que les…

p. 207 :

…chefs de l’État se sont faits les sectateurs de leur doctrine, dont ils passent eux-mêmes pour les interprètes. Ainsi arrive-t-il qu’ils osent usurper le droit et l’autorité du souverain, ont le front de se prétendre immédiatement élus par Dieu et de revendiquer pour leurs décrets un caractère devant lequel ils veulent que s’inclinent ceux du souverain, œuvre tout humaine ; toutes choses entièrement contraires, personne ne peut l’ignorer, au salut de l’État. 

[17] Ici comme au chapitre XVIII nous concluons donc que ce qu’exige avant tout la sécurité de l’État, c’est que la piété et la religion soient comprises dans le seul exercice de la charité et de l’équité, que le droit du souverain de régler toutes choses tant sacrées que profanes se rapporte aux actions seulement et que pour le reste il soit accordé à chacun de penser ce qu’il veut et de dire ce qu’il pense…

(Spinoza revient une dernière fois sur une idée importante : l’État sera d’autant plus sûr qu’il n’exigera de la part des citoyens que la charité et l’équité, qui doivent être les seules exigences conduites. Cela signifie que les opinions religieuses ne doivent pas compter plus que les autres opinions, y compris celles concernant les aspects les plus triviaux de l’existence, et pour lesquelles on ne s’entretue pas en général, comme nos goûts culinaires ou vestimentaires. Mais c’est là une demande exorbitante faite aux religions. Si, comme le pense Durkheim, les religions se caractérisent par une intolérance très grande envers les conduites qu’elle jugent blasphématoires – j’ai déjà parlé de sa définition du fait religieux -, alors une religion qui tolèrera de pareils écarts n’existe pas, ou bien est devenue si faible, si décadente, qu’elle n’a plus la force de s’opposer violemment aux blasphèmes)

p. 208 :

[18] J’ai ainsi achevé de traiter les questions qui rentraient dans mon dessein. Il ne me reste plus qu’à avertir expressément que je soumettrai de grand cœur à l’examen et au jugement des autorités de ma patrie tout ce que j’ai écrit. Si j’ai dit quoi que ce soit qu’elles jugent contraire aux lois du pays ou nuisible au salut commun, je veux que cela soit comme n’ayant pas été dit. Je sais que je suis homme et que j’ai pu me tromper ; du moins ai-je mis tous mes soins à ne me pas tromper et, avant tout, à ne rien écrire qui ne s’accorde entièrement avec les lois du pays, la liberté et les bonnes mœurs.

(par cette déclaration, Spinoza soumet ses propos aux lois de son pays et aux décisions du souverain des Provinces-Unies, dont la devise était : « L’union fait la force ». Pour rien au monde, Spinoza ne voulait apparaître comme séditieux. de fait, il ne l’était pas. Il est apparu, à tort, comme tel pour ceux qui combattaient ses idées. Ce sont les idées de Spinoza qui ont fini par être appliquées, même si la monarchie n’était pas le régime qu’il préférait, du fait des défauts inhérents à ce régime politique – qui était le préféré de Platon : « le Roi est d’autant moins son maître et (…) la condition des sujets est d’autant plus misérable à mesure que le droit de l’État est transféré plus complètement à un même individu. » (Traité politique, chapitre VI, De la monarchie, §6)

Un peu d’histoire : cet État républicain dura de 1579 à 1795, l’ancêtre du royaume des Pays-bas. Les Pays-bas sont nées de la révolution contre le dominateur espagnol, le roi Philippe II. Cette guerre dura 80 ans. La révolution batave, qui fait suite au déclin économique des Provinces-Unies, un temps la nation la plus puissante d’Europe, installe la République batave qui est remplacée en 1806 par le Royaume de Hollande, avec à sa tête le troisième frère de Napoléon. Le pays devient ainsi pour la première fois une monarchie. C’est une de ces belles ironies de l’histoire dont l’humanité a le secret. À la suite de l’effondrement de l’empire napoléonien, Guillaume Frédéric d’Orange-Nassau en devient le roi, sous le nom de Guillaume 1er. La page Wikipédia qui lui est consacré dit, avec un humour involontaire, « Prédécesseur : lui-même ». Il a pour successeur Guillaume II, puis Guillaume III. N’ayant pas eu de fils, et ses filles non plus, ce seront des femmes, Wilhelmine, Juliana, Beatrix, qui règnent jusqu’en 2013. Guillaume-Alexandre est le roi des Pays-Bas depuis l’abdication de sa mère Beatrix en 2013.  Il est le premier roi à régner sur les Pays-Bas depuis 123 ans. Les Pays-bas sont une monarchie constitutionnelle)

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